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« A l'aune des critères retenus pour l'Europe, 16 % de la population européenne, soit 72

millions de personnes, vivaient en 2003 en dessous des seuils de pauvreté monétaire." Telle
est la conclusion d'une étude de Sarah Bouquerel et Pierre-Alain de Mallerey, deux
économistes maîtres de conférence à l'Institut d'études politiques de Paris, que vient de publier
la Fondation Robert-Schuman.
La tendance générale, à court terme et à long terme, est au recul général de la pauvreté, notent
Mme Bouquerel et M. de Mallerey. Il y a moins de pauvres dans l'Union européenne qu'en
1970, même si la réalité perçue par l'opinion publique ne va pas nécessairement dans ce sens."
Les deux experts soulignent d'abord les importants problèmes méthodologiques auxquels se
heurte la mesure de la pauvreté. C'est "un phénomène multiforme, difficile à cerner avec
exactitude", estiment les deux économistes, en remarquant que "s'il ne fait aucun doute qu'un
ménage ne disposant pas des ressources nécessaires pour subvenir à ses besoins les plus
élémentaires comme se nourrir, se loger ou se chauffer est pauvre, (...) que dire d'un foyer qui
ne peut partir en vacances, acquérir un lave-vaisselle ?"
La pauvreté est à la fois objective, liée aux revenus, et subjective, liée aux représentations
sociales, "qui varient selon les contextes et les pays." Le fait de ne pas posséder une voiture
n'aura pas la même signification au Portugal ou au Danemark, observent les deux
économistes.
En 1984, un Conseil européen avait tenté de prendre en compte ces deux dimensions : "Des
personnes vivent dans des situations de pauvreté si leur revenu et leurs ressources matérielles,
culturelles et sociales sont à ce point insuffisants qu'elles les empêchent d'avoir des conditions
acceptables dans le pays membre où elles vivent."
Parmi les critères envisageables de la pauvreté - "administrative", qui s'intéresse aux
bénéficiaires de dispositifs sociaux ; "conditions de vie", qui prend en compte les privations ;
"subjective", établie à partir de questionnaires sur la situation financière -, les Etats membres
de l'Union européenne ont finalement décidé de retenir celui "de pauvreté monétaire relative".
Sont considérés comme pauvres les individus ne disposant pas d'un revenu égal à 60 % du
revenu médian dans le pays concerné. " La pauvreté ainsi définie est une notion strictement
nationale et non européenne", soulignent Mme Bouquerel et M. de Mallerey.
En utilisant la méthode des standards de pouvoir d'achat (SPA), le seuil de pauvreté pour une
personne vivant seule se situait ainsi en 2001 à 2 183 SPA en Estonie et à 14 376 SPA au
Luxembourg.
"Un Allemand pauvre a un pouvoir d'achat environ deux fois supérieur à celui d'un Portugais
pauvre, ce qui amène à relativiser la notion de pauvreté, notent les deux économistes. S'il
existe des pauvres en Estonie, au Portugal, en Italie, en France et même au Luxembourg, le
pauvre Européen, lui, l'Union européenne ne le connaît pas encore."
Les pays enregistrant les résultats les plus défavorables sont la Slovaquie, l'Irlande et la Grèce
(21 % de la population en situation de pauvreté), suivis du Portugal, de l'Italie, de l'Espagne
(19 %), du Royaume-Uni et de l'Estonie (18 %). A l'autre extrémité, on trouve la République
tchèque (8 %), le Luxembourg, la Hongrie et la Slovénie (10 %), suivis de la Finlande et de la
Suède (11 %), du Danemark, de la France, des Pays-Bas (12 %) et de l'Autriche (13 %).
La performance de la République tchèque tient au fait que la notion de pauvreté monétaire
relative est pour partie une mesure d'inégalité. Ce biais statistique explique aussi que le pays
d'Europe où la pauvreté a le plus baissé depuis dix ans est l'Allemagne, malgré la faiblesse de
sa croissance. Et celui où elle a le plus progressé est l'Irlande, qui a, au contraire, enregistré un
boom économique. »

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