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Introduction
1
Modigliani et Miller (1958) ont été les premiers à mener l’analyse théorique de
l’incidence de la structure financière, et notamment du ratio dettes/fonds propres, sur
la valeur de la firme. Ils montrent ainsi que, sous certaines hypothèses, toutes les
formes de financement sont équivalentes en présence de marchés financiers parfaits
en raison du principe selon lequel les écarts de rentabilité corrigent exactement les
écarts de risque.
De Angelo et Masulis (1980) présentent un modèle qui nuance l’effet des déductions
directes d’impôts liées à l’endettement. Ils montrent que les déductions fiscales liées
cette fois à l’investissement et aux amortissements peuvent jouer le rôle de « produits
de substitution » vis à vis des avantages fiscaux de l’endettement.
Par ailleurs, et comme le suggèrent Harris et Raviv (1991), l’importance des coûts de
défaillance justifierait que la loi de faillite soit considérée dans chaque pays comme
aspect intégral du contrat de dette. En effet, la législation en matière de faillite et
l’application plus ou moins stricte selon les cas des droits du créancier augmente la
probabilité de sanction des dirigeants de l’entreprise endettée.
1
Les principales hypothèses du modèle sont les suivantes : les marchés financiers sont parfaits ; les
agents peuvent prêter ou emprunter à un taux fixe et sans limite ; les coûts de faillite sont nuls ; il n’y a
pas d’asymétrie d’information entre les agents ; et les dirigeants gèrent conformément à l’intérêt des
actionnaires (absence de conflits d’intérêt).
2
Les problèmes posés par la remise en question de l’hypothèse d’absence de conflits
entre les différents acteurs de la vie économique et financière de l’entreprise
(dirigeants, actionnaires et créanciers) relève de la théorie dite « de l’agence ». La
relation d’agence se définit comme un contrat par lequel un mandant a recours au
service d’un mandataire pour accomplir en son nom et pour son compte une tâche (la
gestion de l’entreprise). Le mandant et le mandataire maximisant leur utilité, leurs
relations sont source de conflits.
La relation qui s’établit entre un bailleur de fonds (la banque) et l’entreprise est sujette
à l’asymétrie d’information. Cette hypothèse consiste à considérer que le niveau et la
qualité de l’information ne sont pas identiques entre les agents et ceci durant la durée
totale de la relation de crédit. Ainsi, avant la signature du contrat, l’existence de
projets d’investissements de qualité différente pose le problème de la « sélection
adverse » (Akerloff, 1970). Durant la relation de crédit, la banque (le mandataire) peut
se trouver, par manque d’informations, dans l’impossibilité de vérifier exactement les
efforts fournis par le mandant (l’entreprise).
Dans cette optique, les dirigeants d’entreprises ayant de bons projets d’investissement
doivent se signaler auprès des créanciers pour ne pas souffrir d’une trop forte
asymétrie d’information. Dans ce contexte, la structure des capitaux de la firme peut
être un signal envoyé aux créanciers (Ross, 1977). Dans ce modèle, le dirigeant
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détenant l’information sur la valeur de son projet d’investissement, engage une part
importante des fonds de l’entreprise dans le projet de façon à se signaler auprès de la
banque. Le degré de diversification du portefeuille du dirigeant peut également
signaler aux créanciers la qualité des projets d’investissement de l’entreprise (Leland
et Pyle, 1977). Ce raisonnement est particulièrement pertinent dans le cas de petites et
moyennes entreprises ou à caractère familial pour lesquelles la part de richesse
personnelle investie par le dirigeant s’avère révélatrice.
A l’opposé, l’hypothèse de l’existence d’un ratio de dette sur fonds propres optimal au
niveau individuel est rejetée par les modèles de « hiérarchie » ou de « pecking order
». Toujours en raison des asymétries d’information entre les agents aussi bien à
l’intérieur de l’entreprise qu’à l’extérieur, l’entreprise suit une hiérarchie des
financements précise, dictée par la nécessité de fonds externes, et non par une
tentative de trouver la structure de capital optimale. Cette hiérarchie s’exprime
toutefois différemment et ceci, en fonction de l’objectif poursuivi par le dirigeant de
l’entreprise. Dans le cas où le dirigeant agit dans l’intérêt des actionnaires existants, la
hiérarchie financière décroissante définie par Myers et Majluf (1984) est la suivante :
autofinancement, dette peu risquée, dette risquée et augmentation de capital en dernier
ressort.
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Il ne s’agit pas dans cette section d’effectuer un recensement des travaux de validation
empirique existants sur les théories du choix de financement des entreprises, mais
plutôt de montrer la place et l'importance du cadre institutionnel sur le comportement
des firmes dans cette littérrature qui met l'accent sur l'intérêt d’étendre ce genre
d’études à d’autres pays.
Une analyse des majeures différences institutionnelles entre les pays du G-7 a été
fournie par Rajan et Zingales (1995). Ils affirment que les caractéristiques
institutionnelles qui affectent la structure de capital sont : le code des impôts, les lois
en matière de faillite, l’état du développement des marchés financiers et les formes de
structure de propriété.
Miguel et Pindado (2001) insistent sur l’effet des caractéristiques institutionnelles sur
la structure du capital des entreprises. Les différences de structure financière entre
pays sont dues à la différence de leurs caractéristiques institutionnelles. Pour cela, ils
introduisent dans la discussion les caractéristiques institutionnelles espagnoles et leur
impact sur la structure de financement des firmes.
Les variables explicatives sont liés aux taxes, au coût de détresse financière, à
l’investissement et aux cash flow et free cash flow. Trois autres variables considérées
comme institutionnelles ont été introduites : une mesure de la dette détenue
publiquement, le degré de concentration de la propriété, ainsi qu’une variable
destinée à saisir l’existence d’asymétrie d’information.
Sur les 133 entreprises de l’échantillon examinées de 1990 à 1997, les tests de Miguel
et Pindado (2001) corroborent les principaux résultats attendus : le ratio de dette est
inversement lié aux cash flows, aux avantages fiscaux non liés à la dette et aux coûts
de détresse financière, mais directement lié à l’investissement.
5
Jusqu’alors, c’est exclusivement les caractéristiques des pays dits développés qui ont
été examinées, majoritairement ceux des Etats-Unis et dans une moindre mesure les
autres pays du G-7 et européens. Cependant, les études qui tentent d’expliquer le
comportement des entreprises dans les pays en voie de développement sont beaucoup
plus rares. Les travaux de Shabou (1995) sur des entreprises tunisiennes, de Ndoume
Essingone (1997) sur des entreprises gabonaises et de Booth et al. (2001) sur des
données provenant de 10 pays en voie de développement, constituent des exceptions à
cette « règle ».
Le modèle empirique testé est une régression de trois mesures différentes du ratio de
dettes 2 contre le taux d’imposition de la firme, l’écart type de la rentabilité
économique, la tangibilité des actifs, le logarithme naturel du chiffre d’affaires, la
rentabilité économique et le ratio market-to-book. Ces auteurs constatent que les
facteurs qui influencent le choix de structure financière sont similaires dans les pays
développés et les pays en voie de développement. Cependant, les signes de certains
coefficients, et plus particulièrement le risque d’activité et le ratio market-to-book,
sont contraires à ceux prévus. L’explication donnée est que les entreprises dans les
pays en voie de développement sont davantage dépendantes de la dette à court terme
et de la dette commerciale, qui ont d’autres déterminants que la dette à long terme.
A l’exception de la Corée du Sud, qui est de loin le pays le plus développé de leur
échantillon, ils trouvent que tout les pays en voie de développement ont des niveaux
de dettes inférieurs à la médiane de ceux des pays du G-7. Ils notent également que la
différence entre les ratios de dette totale et de dette à long terme est beaucoup plus
accentuée dans les pays en voie de développement que dans les pays développés.
Booth et al. (2001) trouvent, comme Demirguc-Kunt et Maksimovic (1999), qu’une
différence majeure entre pays développés et pays en voie de développement est que
ces derniers ont substantiellement moins de dettes à long terme.
2
Le ratio de dettes totales, le ratio de dettes à long terme sur les capitaux propres (en valeur de bilan) et
le ratio de dettes à long terme sur les capitaux propres calculés en valeur de marché. Le ratio de dettes
totales est égal au rapport du total passif moins les capitaux propres et du total passif. Les auteurs
admettent que ce ratio présente des problèmes, mais justifient ce choix par le fait que c’est le seul ratio
qui peut être calculé pour l’ensemble des 10 pays (cf. Booth, Aivazian, Demirguc-Kunt et Maksimovic,
2001, p. 89).
6
Booth et al. (2001) restent cependant sceptiques. Malgré que certains variables
indépendantes ont les signes prévus, leur impact total est faible et les signes varient
parfois entre pays. Cela sous-entend des différences institutionnelles significatives qui
affectent l’importance des variables indépendantes. Le cadre institutionnel qui
gouverne la faillite, la préparation des états financiers et la disponibilité des
différentes formes de financement sont au moins aussi importantes que les variables
directes qu’ils mesurent. Les auteurs concluent que beaucoup de travail reste à faire
sur le plan de la recherche empirique avec l’amélioration de la qualité des bases de
données internationales, ainsi que sur le plan théorique par le développement de
modèles qui fournissent un lien plus directe entre la profitabilité et le choix de
structure de capital.
3. La base de données
La raison principale de la rareté des recherches en corporate finance dans les pays les
moins développés, par rapport à celles conduites dans les pays développés et les pays
industrialisés, est l’absence de données inter-entreprises sur une base standardisée et
comparative. Au Liban, aucune centrale de bilans n’existe tant au niveau du secteur
public qu’au niveau du secteur privé et aucune initiative n’a permis de développer une
telle base de données que ça soit auprès d’un ministère, de la banque centrale, d’une
banque commerciale ou autre. Ce constat a souvent constitué un obstacle au
développement des recherches économiques et financières. Ainsi, tout travail de
recherche en finance d’entreprise dans un tel cadre repose sur l’établissement
préalable d’une base de données de firmes susceptible de faire l’objet de tests
empiriques.
Les données utilisées dans la présente étude sont issues d’une base de données que
nous avons personnellement créée à partir des informations comptables, bilans et
comptes de résultat, de 85 entreprises libanaises (après élimination des entreprises
présentant des données incomplètes), étudiées sur la période 1993-1998. Aucune
information concernant la répartition des titres de propriété et la structure de contrôle
n’a pu être collectée, du moins pour la plupart des firmes retenues.
Les firmes ont été classées selon leur appartenance au secteur commercial, industriel,
ou de services. En effet, nous retiendrons la classification établie par Blaise (1999) 3
qui regroupe les activités commerciales sous quatre grandes rubriques : les activités
de distribution, les activités industrielles, les activités de services et les activités
financières. Ces dernières ne font pas partie de notre étude.
Compte tenu de cette classification, notre échantillon est réparti comme suit :
3
Blaise J.-B., Droit des affaires, L.G.D.J., 1999, p. 73.
7
Tableau 1 : La composition par secteur d'activité de l'échantillon :
Industrie 25 29.41%
Commerce 46 54.12%
Services 14 16.47%
85 100.00%
Les capitaux propres des entreprises de notre échantillon constituent près du quart des
ressources de celles-ci seulement. Ceci dit, la structure financière n’a cessé de
s’améliorer en passant de 15,6% en 1994 à 27,0% en 1997 7.
Cependant, les autres dettes, représentant les dettes d’origine interne (actionnaires et
diverses sociétés associées) telles que définies par Biais et al. (1995), constituent en
moyenne 25% du total passif. Celles-ci, avec les capitaux propres, représentent
presque la moitié des ressources des entreprises libanaises de l’échantillon.
4
Statistiquement, l’établissement de l’inférence fait appel aux tests statistiques et à l’estimation
(construction d’intervalle de confiance). Il ne s’agit pas de la mise en œuvre de tels tests.
5
Comme le montre les rapports de la Banque du Liban (Annual Report, BDL, éditions 1994 à 1998) et
de l'Administration Centrale de la Statistique (Résultats du Recensement des Immeubles et des
Etablissements, ACS, n° 1 à 5, 1997 ; et L’Etat des Comptes Economiques 1994-1995, ACS, 1997).
6
Cette période d’étude revêt un intérêt particulier. En effet, il s’agit de la période d’après guerre au
Liban, caractérisée par la reconstruction et le recours massif des entreprises au financement pour
rétablir leurs moyens de production, de commercialisation … Pendant cette période, la législation en
matière de financement, d’investissement et de réévaluation des actifs des entreprises a connu un essor
considérable pour aller de paire avec les efforts de reconstruction et de relance économique.
7
Cela est dû en partie aux procédures de réévaluation.
8
Le fait de cumuler capitaux propres et dettes d’origine interne découle du constat de
complémentarité de ces deux sources de financement au sein de la structure de bilan
des entreprises. En effet, ces deux moyens de financement évoluent d’une manière
inverse durant toute la période d’étude pour représenter une moyenne quasi constante
variant de 46% à 48% du total bilan. Autrement dit, lorsque les capitaux propres
augmentent, les autres dettes diminuent et d’une manière proportionnelle, ce qui
confirme l’effet de substitution et de complémentarité de ces deux sources de
financement. Ainsi, les autres dettes passent de 31% en 1994 à 19% en 1997, soit une
diminution de 12% équivalente mais en sens inverse à la variation du poste de
capitaux propres.
Tableau 3 :
Masses bilancielles / Passif
Moyenne
94 95 96 97
Capitaux propres 0,156 0,223 0,258 0,270 0,227
Intérêts minoritaires 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000
Prov./ risques et charges 0,025 0,023 0,027 0,024 0,025
Emprunts obligataires 0,005 0,004 0,003 0,003 0,004
DLMT 0,020 0,033 0,050 0,035 0,035
Cptes associés, filiales et sociétés mères 0,309 0,265 0,209 0,190 0,243
Fournisseurs et autres cptes créditeurs 0,271 0,227 0,234 0,246 0,245
DCT 0,213 0,227 0,218 0,233 0,223
DCT KP
PRC
DLT
Cptes créd.
Autres
On remarquera que les emprunts obligataires représentent une part très mince du
financement des firmes de notre échantillon (0,4%) caractéristique d’un marché
financier peu développé ne favorisant pas l’émission de dettes de marché, et cumulé
au caractère généralement non transparent et fermé des firmes libanaises.
9
Les dettes commerciales financent de leur part le quart de l’activité des entreprises et
sont assez stables sur la période étudiée. Cela confirme le recours et la dépendance
des entreprises libanaises à ce mode de financement inter-entreprises. Selon Petersen
et Rajan (1997), il est préféré au crédit bancaire à chaque fois qu’il est moins coûteux
ou plus disponible. Il est particulièrement important dans le cadre du financement des
PME, n’ayant pas accès aux marchés des capitaux, et caractérisant de part leur taille et
leur structure de propriété les entreprises libanaises. Le crédit fournisseurs représente
plus de la moitié des dettes à court terme des entreprises françaises selon Dietsch
(1998).
Un autre quart du bilan est financé par les dettes financières. Elles sont cependant
essentiellement constituées de dettes à court terme. En effet, celles-ci représentent
22% du total bilan alors que les dettes à long terme ne représentent que 3,5%. Cette
prédominance des dettes à court terme confirme les résultats de Booth et al. (2001)
dans les pays en voie de développement par opposition aux pays du G7. Cela montre
l’intérêt d’une comparaison internationale des structures de financement et de situer
les entreprises par rapport à ces convergences ou divergences dues à des cadres
institutionnels comparables ou différents.
4. Comparaison internationale
Multiples sont les raisons qui pourraient se traduire par des différences de structures
financières d’un pays à l’autre. Il s’agit tout d’abord de disparités d’ordre fiscal, des
usages bancaires et d’une manière plus générale de l’environnement économique
propre à chaque pays. Une autre raison de nature technique est également à
mentionner, elle tient aux particularités relatives aux normes comptables et à la
manière de mesurer l’endettement. Le crédit-bail, par exemple, figure au bilan des
entreprises américaines mais pas des entreprises françaises ou libanaises.
Tout d’abord, le tableau suivant reporte les masses bilancielles relatives aux
entreprises libanaises et marocaines, comparées à celles des pays du G7 :
10
Masses bilancielles
Immob. corp. 37,7 30,1 34,1 27,8 34,3 42,8 56,4 31,1 30,9
Immob. fin. 3,1 9,4 3,4 4,9 4,1 1,2 2,9 6,8 2,3
Immob. incorp. 7,6 0,8 2,4 8,5 2,6 0,9 4,7 1,0
Autres cptes / associés-Actif * 5,8 2,9 0,7 0,7 3,3 0,5 3,7 3,2
Stocks 16,1 13,9 23,6 17,4 15,6 17,7 11,0 27,0 29,8
Clients et autres cptes débiteurs 20,7 25,5 27,0 30,6 30,6 25,8 14,9 29,7 20,0
Disponibilités 11,2 18,4 8,8 10,3 10,5 11,4 8,2 5,4 12,9
Capitaux propres 34,1 33,2 28,0 31,2 32,6 42,2 39,7 28,4 22,7
Intérêts minoritaires 0,6 0,9 1,6 3,9 3,4 1,1 2,0 0,0
Prov./ risques et charges 2,7 2,8
DLMT 23,3 18,9 9,8 15,7 12,1 12,4 28,1 10,8 3,5
Autres Cptes / associés-Passif * 9,0 4,9 31,2 7,6 9,3 4,3 7,0 24,3
Fourn. et autres cptes créditeurs 26,0 25,8 20,2 34,0 26,9 30,4 16,1 36,5 24,5
DCT 7,4 16,4 9,9 11,6 16,2 9,6 7,3 21,6 22,3
Les données des pays du G-7 proviennent de Rajan et Zingales (1995), ceux du Maroc de El Bakkali
(1994). La valeur de chaque poste est calculée comme une fraction du total actif figurant au bilan, et
dont la moyenne est ensuite calculée pour toutes les firmes de l’échantillon. Seulement les bilans des
entreprises non-financières sont inclus dans chaque échantillon par pays.
* Ces deux comptes représentent les autres comptes d’actif ou de passif à long terme pour les pays du
G-7 reportés par Rajan et Zingales (1995), alors qu’ils représentent exclusivement les comptes des
actionnaires, associés… dans le cadre de nos données sur les entreprises libanaises
La part des stocks dans le bilan des entreprises libanaises est supérieure à celle de tous
les autres pays. Cela pourrait provenir du secteur d’activité auquel appartiennent les
entreprises de notre échantillon, surtout commerciales et industrielles et moins de
services. Cependant, cette part se rapproche du niveau présent chez les entreprises
marocaines, et impliquerais des différences au niveau de la gestion des stocks par
rapport aux entreprises des pays plus développés.
La structure financière, mesurée par la part des capitaux propres dans le total bilan,
des entreprises libanaises est la plus faible. Elle est suivie par celle des entreprises
marocaines. Cela montre que les entreprises des pays en voie de développement
disposeraient de structures financières moins solides que celles des pays développés.
A l’intérieur de ceux-ci, nous notons que c’est les entreprises des pays anglo-saxonnes
qui bénéficient des structures les plus solides, allant jusqu’à plus de 40% au
Royaume-Uni ou au Canada.
11
Concernant la dette financière, nous remarquons que le niveau de 26% des entreprises
libanaises est supérieur à celui des entreprises anglaises et allemandes, mais inférieur
à celui des entreprises marocaines et des autres pays du G7. Cependant, l’examen du
terme de cette dette s’avère particulièrement intéressant.
Ceci est dû, d’une part, au défaut de dettes financières à long terme et, d’autre part, à
l’accès limité des entreprises des pays en voie de développement, dont ces deux pays
MEDA, au marché des capitaux propres. En effet, la part des dettes à long terme et
celle des capitaux propres des firmes libanaises et marocaines sont parmi les plus
faibles, comparées aux autres entreprises des pays développés.
Les données des 10 pays en voie de développement proviennent de Booth et al. (2001), ceux des pays
du G-7 proviennent de Rajan et Zingales (1995). Le ratio de dettes totales est égal au total passif moins
12
les capitaux propres divisé par le total passif. Le ratio de dettes à long terme est égal au total passif
moins capitaux propres et passif à court terme divisé par le total passif moins passif à court terme.
Pour permettre la comparaison, les mêmes formules de calcul des ratios ont été
appliquées aux données de Rajan et Zingales (1995), ainsi qu'à nos données et
adoptées de celles de Booth et al. (2001). Ainsi, le ratio de dettes totales est égal au
total passif moins les capitaux propres sur le total passif, incluant ainsi les dettes
commerciales et les autres dettes (dettes d’origine interne). Le ratio de dettes à long
terme est égal au total passif moins les capitaux propres et le passif à court terme
divisé par le total passif moins le passif à court terme.
80.0
70.0
60.0
50.0
40.0
30.0
20.0
10.0
0.0
Brésil Corée du Pakistan Zimbabwe Japan Italie
Sud
13
Comparaison internationale: Ratio de dettes à long terme (en% )
70.0
60.0
50.0
40.0
30.0
20.0
10.0
0.0
Brésil Corée du Pakistan Liban Allemagne Royaume-
Sud Uni
Le ratio de dettes totales varie entre une valeur minimale de 30,3% au Brésil et une
valeur maximale de 77,3% au Liban et de 73,4% en Corée du Sud. Les entreprises
semblent se répartir entre un groupe de faible endettement, constitué du Brésil, du
Mexique, de la Malaisie et du Zimbabwe ; un groupe de fort endettement, constitué de
l’Inde, du Pakistan, de la Corée du Sud ainsi que le Liban ; et un groupe intermédiaire
constitué par la Jordanie, la Turquie et la Thaïlande. On retrouve un classement
similaire lorsqu’on considère le ratio de dettes à long terme.
Il est à noter que ce ratio de dettes à long terme (ainsi que le ratio de dettes totales)
englobe les comptes des actionnaires et associés. Sans ces comptes, ce ratio aurait
était de 21,7% pour le Liban, au lieu d’un niveau excédant les 50% reporté dans le
tableau ci-dessus, d’où l’intérêt de comparer exclusivement les dettes bancaires. Ce
calcul est impossible pour les autres pays en voie de développement, les données de
l’IFC ne permettant pas ce calcul.
14
Les données des pays du G-7 proviennent de Rajan et Zingales (1995), ceux du Maroc de El Bakkali
(1994).
40.0
35.0
30.0
25.0
DCT
20.0
DLT
15.0
10.0
5.0
0.0
Etats-Unis Allemagne Italie Canada Liban
En effet, les dettes financières à court terme représentent l'essentiel du total de ces
dettes au Liban ainsi que la grande part des dettes des firmes marocaines, alors que
c'est les dettes à long terme qui dominent les dettes à courte maturité dans les pays du
G-7. Cela rejoint la constatation de Booth et al. (2001) qui trouvent que les entreprises
des pays en voie de développement ont moins de dettes à long terme que les
entreprises des pays développés. Quelque soit la mesure retenue de l’endettement, en
terme de valeur bilancielle ou en valeur de marché, ces auteurs concluent que le
niveau de l’endettement dans les pays en voie de développement 8 est inférieur à la
médiane des pays du G-7.
Ainsi, on note que la différence entre le ratio de dettes totales et le ratio de dettes à
long terme est largement plus prononcée dans les pays en voie de développement que
dans les pays développés. Cela recoupe également les résultats de Demirguc-Kunt et
Maksimovic (1999), pour qui une différence majeure entre pays développés et pays en
voie de développement est que les pays en voie de développement ont
substantiellement moins de dettes à long terme.
8
A l’exception de la Corée du Sud, le pays le plus développé de leur échantillon.
15
L’objet de cette section est d’étudier le comportement de financement de notre panel
d’entreprises, en prenant comme cadre de référence les modèles ayant trait à
l’information, telles que les théories de l’agence et du signal.
Après avoir identifié les variables pouvant être considérées comme déterminantes de
la structure financière, nous en proposons une mesure et nous testons ensuite, parmi
les facteurs proposés, ceux qui sont en mesure d’affecter significativement le ratio
d’endettement financier des entreprises de notre panel.
Une des principales difficultés des études empiriques qui ont tenté de tester les
modèles que nous avons exposés, est la mesure des variables. De ce fait, nous
sommes conduits dans le reste de cette étude à formuler, à l’instar de Dubois (1984),
l’hypothèse suivante : « les variables des modèles théoriques n’étant pas observables,
nous supposons que les mesures comptables peuvent servir à les estimer, c’est-à-dire
qu’il existe une forte corrélation entre les vrais valeurs et les indicateurs
comptables »9.
Nous testerons une multitude de proxies pour la même variable théorique. Cela
permet de distinguer l’effet de chaque mesure ; s’ils sont concordants et s’ils amènent
aux mêmes conclusions. Dans ce qui suit, la variable explicative est régressée à la
dette financière totale sur l’actif total (DFIAT), à la dette financière à long terme sur
l’actif total (DFLTAT), et à la dette financière à court terme sur l’actif total
(DFCTAT) respectivement, la dette financière totale étant égale à la somme de la
dette financière à long terme et de la dette financière à court terme (DFIAT =
DFLTAT + DFCTAT).
9
Cf. Dubois (1984), p. 50.
10
Cf. Shabou (1995), p. 67.
16
ratio d’actif immobilisé plus les stocks sur le total actif comme proxy de la
structure de l’actif d’une entreprise.
D’un autre côté, on a vu que d’après Jensen et Meckling (1976), les actionnaires,
après émission d’une dette, peuvent être incités à accroître le risque d’exploitation de
la firme afin d’exproprier les prêteurs. Le niveau des actifs immobilisés et les prêts
des associés viennent réduire ces coûts d’agence. Ces deux variables devraient donc
être positivement reliées au ratio d’endettement. Cette relation est également
conforme aux prédictions de Ross (1977). En effet, selon Biais et al. (1995), les prêts
des associés peuvent aussi, comme la profitabilité, constituer un signal positif et
devraient être positivement corrélés avec l’endettement.
Dans le tableau ci-dessus, il est intéressant de noter des résultats compatibles avec la
relation prédite par la théorie. La présence d’actifs physiques se matérialise par un
endettement supérieur. le risque de défaillance apparaît ainsi comme un déterminant
important de l’endettement. Ce résultat est également trouvé par Biais et al. (1995)
dans le cadre institutionnel français. Dans un cadre économique moins développé,
Ndoume Essingone (1997) déduit que la crainte de faillite explique le choix de
financement des firmes gabonaises. Il note que « le risque de faillite guide les firmes
dans leur choix de financement, notamment les conduit vers le désendettement. On a
remarqué que le risque financier des entreprises est assez élevé, dans un
environnement où les banques subissent l’encadrement du crédit et répugnent à
accorder des crédits aux entreprises à cause du peu de crédibilité dont elles disposent
à la suite de nombreux impayés »11.
De leur part, les prêts des associés sont aussi positivement corrélés avec
l’endettement. Cette relation positive est également trouvée par Biais et al. (1995) sur
des données françaises, confirmant ainsi la théorie de signalisation par le fait que les
dettes d’origine interne influencent positivement les dettes financières.
5.2. La profitabilité
Selon Ross (1977) le levier d’endettement est positivement corrélé à l’existence d’une
information privée révélant une situation favorable, la profitabilité étant un
indicateur de cette dernière.
11
Ndoume Essingone (1997), p. 287.
17
A l’opposé, selon Myers (1984), Myers et Majluf (1984), Narayanan (1988), et
Heinkel et Zechner (1990), les entreprises vont privilégier le financement interne par
rapport au financement externe tant que cela sera possible. Titman et Wessels (1988)
suggèrent la profitabilité comme indicateur de la disponibilité de financement interne.
Selon la théorie du Pecking Order, la profitabilité devrait être négativement corrélée
avec le financement externe.
5.3. La fiscalité
Après relaxation des suppositions de non relevance, les firmes ayant des charges
d’impôt élevées, sont supposées recourir davantage à l’endettement pour tirer profit
de la déductibilité des intérêts. Pour cela, le ratio de Zimmerman (1983) 14 d’impôts
payés sur les bénéfices avant impôt est utilisé comme proxy du taux effectif
d’impôt.
Par ailleurs, selon DeAngelo et Masulis (1980), les déductions fiscales non liées à la
dette constituent une substitution à l’avantage fiscal de l’endettement. Les entreprises
ayant des économies d’impôts non liées à la dette (Non-Debt Tax Shield) plus élevées
sont supposées avoir des niveaux d’endettement plus faibles.
12
A l’exception de l’échantillon réduit du Zimbabwe.
13
Cf. Booth et al. (2001), p. 105 : “The most successful of the independent variables is profitability, as
it is consistently negative and highly significant”.
14
Zimmerman J., “Taxes and firm size”, Journal of Accounting and Economics, n° 5, 1983.
18
Une mesure approximative des économies fiscales non liées à la dette, et utilisée par
les études empiriques, est le ratio des dotations aux amortissements sur le total
actif (DA/AT).
Une autre mesure également utilisée par la littérature empirique est celle définie
préalablement par Titman et Wessels (1988). Soient NDTS i les économies d’impôts
non liées à la dette et, EBITi, Ii et Ti, respectivement le résultat d’exploitation, le
montant des charges d’intérêts déductibles et le montant de l’impôt sur les sociétés
pour la firme i. indique le taux d’imposition sur les bénéfices, soit un taux de 10 %
en vigueur au Liban sur notre période d’étude.
Le montant de l’impôt sur les sociétés est donc calculé comme suit :
Ti = (EBITi – Ii – NDTSi), d’où on déduit :
NDTSi = EBITi – Ii – Ti/
Le coefficient du taux effectif d’impôt est très élevé, significatif et de signe positif
conforme aux prédictions de la théorie. Les entreprises les plus fortement taxées sont
celles qui recourent le plus à l’endettement pour tirer profit de la déductibilité des
charges d’intérêt. Concernant les économies d’impôts non liées à la dette, nos
résultats dépendent du proxy utilisé pour mesurer cette variable :
- NDTS/AT définie par Titman et Wessels (1988) : le résultat est conforme à la
théorie et significatif. C’est un résultat également obtenu par Long et Malitz
(1985) sur données américaines et Biais et al. (1995) pour les entreprises
françaises. Mais il est en opposition avec les résultats présentés par Titman et
Wessels (1988) et Bradley et al. (1984);
- DA/AT : la relation est positive et significative avec un coefficient très élevé, ce
qui va à l’encontre de l’argument de DeAngelo et Masulis (1980). Cette relation
positive entre l’avantage fiscal non lié à la dette et l’endettement est aussi
retrouvée par Moh’d et al. (1998) sur données américaines ainsi que Shabou
(1995) sur données tunisiennes. Une explication possible de ce résultat donnée par
Moh’d et al. (1998) est que l’essentiel des économies d’impôts non liées à la dette
est dû aux dotations aux amortissements et que des dotations aux amortissements
élevées sont caractéristiques des entreprises avec des niveaux d’actifs immobilisés
plus élevés, qui, à leur tour (les actifs immobilisés), peuvent avoir une valeur
« collatérale » et donc accroître la capacité d’endettement de la firme15.
19
entreprises libanaises. En effet, celles-ci bénéficient d’autres avantages et exemptions
fiscales que seules les dotations aux amortissements ne peuvent représenter.
Selon les théories liées aux coûts d’agence (problèmes de substitution d’actifs, Jensen
et Meckling [1976], de sous-investissement, Myers [1977] et de free cash flows,
Jensen [1986]), une relation négative est prédite entre les opportunités de croissance
et le levier financier. D’après la théorie du pecking order de Myers (1984), la dette est
positivement liée à la croissance et aux opportunités de croissance. Les entreprises en
expansion sont susceptibles de faire plus appel aux ressources pour financer les
nouveaux investissements.
La variable croissance peut être mesurée par le taux de croissance du chiffre
d’affaires, ou celui du total actif. Les opportunités de croissance sont souvent
mesurées par le ratio market-to-book, non mesurable dans le cadre de nos données, ou
les dépenses de recherche et développement.
Myers et Majluf (1984) suggèrent également qu’un ratio de payout faible (ou un ratio
de rétention élevé) correspond à des firmes qui ont des opportunités de croissance et
qui adoptent cette politique pour entreprendre des projets. Il sera étudié ci-dessous.
16
Cette variable mesurant la croissance de l’actif total (ou celle du chiffre d’affaires) est calculée
comme suit : CATt = (ATt – ATt-1) / ATt-1.
20
5.5. La distribution de dividendes
Les théoriciens des relations d’agence ont également établis un lien entre
l’endettement et la distribution de dividendes (Jensen, Solberg et Zorn, 1992). Plus
spécifiquement, il est suggéré que les distributions de dividendes et les dettes agissent
comme substitues dans la réduction des coûts d’agence. Pour cette raison, le ratio de
payout sert comme variable explicative avec une hypothèse de relation inverse. Nous
utilisons également le ratio de dividendes sur les capitaux propres.
Contrairement aux prédictions théoriques, une relation positive du payout est mise en
évidence par nos données, l’autre ratio étant proche de zéro et non significatif. Cela
est conforme à nos hypothèses sur des relations spécifiques d’agence pour les
entreprises libanaises, et que les distributions de dividendes ne jouent pas le même
rôle en terme de réduction des coûts d’agence qu’elles joueraient pour les entreprises
européennes ou américaines. Encore faut-il prouver, dans ce contexte, que les dettes
elles-mêmes jouent ce rôle entre actionnaires et dirigeants des firmes libanaises ?
5.6. La taille
Les conditions d’accès au marché des capitaux ne sont pas les mêmes pour les petites
et les grandes entreprises. Ces dernières ont généralement plus de facilités pour se
procurer les ressources financières dont elles ont besoin. En outre, le risque des
grandes entreprises est plus diversifié (plus de produits, de marchés…). Le degré
d’asymétrie d’information peut également dépendre de la taille de l’entreprise. Ces
constats devraient se traduire par une corrélation positive entre la dette et taille de la
firme.
Nous contrôlons les effets de la taille dans nos modèles de régression de différentes
manières. Tout d’abord, nous diluons les proxies utilisés pour mesurer les autres
déterminants que la taille par une variable taille. De cette manière nous essayons
d’éviter que ces proxies mesurent une partie de l’effet taille. Ensuite, nous incluant
des proxies pour la taille comme régresseurs dans les modèles. A cet effet, le total
actif, le chiffre d’affaires ou même la valeur ajoutée sont souvent utilisés.
21
Taille DFIAT DFLTAT DFCTAT
Coeff. Prob. Coeff. Prob. Coeff. Prob.
Ln (AT) 0,0150 0,0000 0,0027 0,0000 0,0123 0,0000
Ln (CA) 0,0147 0,0000 0,0024 0,0001 0,0123 0,0000
Ln (VA) 0,0176 0,0000 0,0032 0,0000 0,0145 0,0000
L’influence sectorielle sur le niveau d’endettement, outre l’aspect fiscal, est soutenue
par l’idée que les entreprises exerçant une activité identique affrontent le même
environnement économique et technologique. On devrait donc pouvoir observer des
niveaux d’endettement voisins pour des entreprises d’un même secteur ainsi que des
différences inter-sectorielles sensibles.
Sur des données françaises, Biais et al. (1995) mènent des regressions incluant les 24
secteurs industriels et concluent qu’il n’y a pas de relation entre la dette de marché et
les indicateurs sectorielles. Pour la dette bancaire, huit secteurs ont des moyennes
statistiquement significativement différentes de la moyenne générale ce qui est
cohérent avec les résultats de Bradley et al. (1984) sur données américaines.
Pour notre part, le « secteur d’activité » a été capté par une variable muette qui prend
la valeur de 1 si l’entreprise i appartient au secteur d’activité considéré, sinon elle
prend la valeur 0. Les secteurs concernés sont les trois secteurs précédemment
définis : industrie, commerce et services.
17
Toutefois, leurs valeurs restent faibles.
22
D’après les résultats du tableau ci-dessus, nous constatons que plus l’entreprise de
notre échantillon appartient au secteur industriel (ou même commercial), plus elle est
endettée, à l’opposé de l’entreprise qui appartient au secteur de services qui est
statistiquement moins endettée. Le secteur d’activité semble jouer un rôle en tant que
déterminant de la dette des entreprises libanaises. Les coefficients sont statistiquement
très significatifs, à l’exception de la dette financière à long terme des entreprises
commerciales et de la dette à court terme des entreprises de services.
23
Inv. totaux / AT 1,0365 0,0000 0,1610 0,0116 0,8756 0,0000
5.9. Le risque
Quant au risque de défaut, plus il sera élevé, plus les banques seront réticentes à
prêter. Lorsque la dette est garantie, on peut s’attendre à ce que cette réticence soit
limitée. L’actif tangible immobilisé est indicateur de garantie de la dette et est donc
supposé être positivement corrélé au levier d’endettement. Cette variable a été ci-
dessus étudiée (composition de l’actif) et la relation positive vérifiée.
D’après le tableau ci-dessus, nous constatons que toutes les mesures de l’instabilité de
la rentabilité utilisées sont positivement et de manière significative corrélées avec la
structure financière. Cela est contraire aux conclusions de la théorie classique, mais
est conforme aux prédictions de Myers (1977) relatives aux conflits d’agence entre
actionnaires et créanciers. Il est à noter que la variable risque présente des effets
incertains et parfois mixtes dans le cadre de l'étude de Shabou (1995) sur données
tunisiennes, ainsi que Booth et al. (2001) sur leurs données de pays en voie de
développement.
24
En somme, d’après les tests des relations univariées opérés sur notre base de données,
il s’avère que les prédictions des théories de l’agence relatives aux conflits entre
actionnaires et dirigeants ne sont pas vérifiées. Seules celles relatives aux conflits
entre actionnaires et créanciers sont compatibles avec les résultats trouvés.
Ainsi, il ressort que la présence d’actifs physiques au bilan des entreprises libanaises
se matérialise par un endettement supérieur. Il en est de même pour les prêts des
associés qui sont positivement corrélés avec l’endettement. Les actionnaires, après
émission d’une dette, peuvent être incités à accroître le risque d’exploitation de la
firme afin d’exproprier les prêteurs (Jensen et Meckling, 1976). Le niveau des actifs
immobilisés et les prêts associés viennent donc réduire ces coûts d’agence.
Par ailleurs, nous constatons que l’instabilité de la rentabilité est corrélée avec la
structure financière. Cela est contraire aux conclusions de la théorie classique, mais
conforme aux prédictions de Myers (1977) relatives aux conflits d’agence entre
actionnaires et créanciers.
Il apparaît également que les distributions de dividendes ne jouent pas le même rôle
en terme de réduction des coûts d’agence qu’elles joueraient pour les entreprises
américaines ou européennes.
Cela rejoint la définition de Fama et Jensen (1983) qui ont étudié les relations
d’agence selon le type d’organisation et ont cherché à caractériser la PME en
comparaison avec la grande entreprise. De ce fait, dans une entreprise à caractère
entrepreneurial, il n’existe pas de relations d’agence entre actionnaires majoritaires et
dirigeant propriétaire. Il ne peut y avoir de conflits d’intérêts à ce niveau. Mahérault
(1996) confirme également ces relations dans son étude sur des données françaises et
en donne plusieurs explications18. Le comportement et les conditions financières des
entreprises de notre échantillon sont donc davantage comparable à ce que l'on
retrouve dans le cadre des PME des pays développés.
Finalement, notons que la part des coefficients relatifs à la dette à court terme
(DFCTAT) constitue généralement, et pour toutes les variables considérées, plus de
70 % des coefficients totaux. Cela est dû, d’une part, à la prédominance de la dette
financière à court terme au passif du bilan des entreprises libanaises par rapport à
celle à long terme et, d’autre part, à son existence dans une partie très mince
d’entreprises de notre échantillon. Cette constatation a été notamment relevée lors de
l’étude descriptive du passif du bilan des entreprises libanaises.
Conclusion
Cet article présente les liens entre la valeur et la structure du capital de la firme en
relation avec les récents développements dans les théories de l'agence, de l'asymétrie
de l'information, des distorsions fiscales etc., dans un cadre institutionnel autre que
celui des pays développés. A la lecture des résultats de celui-ci, on constate
l’universalité de certains modèles, c’est-à-dire leur capacité à expliquer le
comportement financier des entreprises autres que celles exerçant dans les économies
développées. En revanche, nos résultats montrent que des modèles théoriques sont
18
Cf. Mahérault (1996), p. 33 et 34.
25
plus pertinents que d’autres dans un contexte économique donné. En effet, les
différences quant à l’effet de certaines variables sont dues aux différences de cadres
institutionnels et à la nature des marchés financiers.
Nos résultats ont montré la dépendance des firmes de ce pays au financement inter-
entreprises, généralement important dans le cadre du financement des PME des pays
développés, n’ayant pas accès aux marchés des capitaux. Les dettes d’origine interne
jouent également un rôle important et montrent l’implication de l’entrepreneur dans
son affaire, et la confusion entre patrimoine personnel et patrimoine de la société.
La dette financière d'origine externe est exclusivement bancaire. En effet, les
emprunts obligataires représentent une part très mince du financement des firmes de
notre échantillon. Cependant, cette dette est essentiellement à court maturité, à
l'opposé de ce que l'on retrouve dans les pays industrialisés.
26
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