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Pour nous entendre, Léonarde est nouveau par rapport à Archimède et vice versa. Cela
ne signifie pas soustraire le génie à son époque pour le mettre à une place
d’universalité abstraite, mais exactement le contraire.
Dans la mesure où Gio Ponti est un homme du XX siècle, et comme tel il est
profondément reconnaissable, il est toujours nouveau, non seulement par rapport à Le
Corbusier ou à Marco Vitruvio, mais aussi par rapport à Renzo Piano et à Jean Nouvel.
«Homme du XX siècle» signifie homme qui a fait le XX siècle, dans le sens qu’il a
répondu avec des idées aux problèmes qui se posaient en 1900 et qu’il a porté, donc,
gravé dans son visage spirituel, les traits uniques de son époque. Seulement un homme
qui est fils de sa propre époque dans ce sens est toujours nouveau, tandis que ne
peuvent pas l’être des hommes communs, anonymes, qui pourraient traverser chaque
époque sans laisser et sans recevoir aucune trace.
Nous pouvons nous représenter la culture, le savoir, l’érudition comme une ratatouille
immense.
Dans une ratatouille le goût à recomposer est déjà donné à priori. Il suffit de mettre,
avec patience et diligence, ensemble les nombreux morceaux dont elle est constituée
et, à défaut de la saveur complète au moins parties significatives d’elle vont prendre
forme.
Qu’est-ce qu’il arrive quand nous rencontrons un problème, quand une affection trop
forte menace de nous détruire ou de nous exalter?
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Notre inertie naturelle, la bêtise, voudrait que nous nous confiions aux parcours déjà
connus et expérimentés de notre milieu, en essayant de réabsorber en eux la
perturbation produite.
Il peut arriver, cependant, que la réabsorption échoue, que les parcours connus de
l’opinion et de la culture se révèlent comme des rues barrées.
En tel cas on a devant soi deux possibilités, les deux à sens unique. Ou notre puissance
d’être est compromise, entamée, détériorée et le comportement, tout d’abord normal,
se fait stéréotypé, en nous amenant ou à une extinction progressive et irréversible ou à
un «casse-tête chinois» incontrôlé. Ou on peut penser, créer des idées, en sachant bien
que la pensée n’est pas un choix parmi les autres mais une décision, seul disponible
pour celui qui à l’«étoffe» et Gio Ponti, lui, il en a à revendre.
Cela arrive car le mouvement de Gio Ponti «penseur» progresse dans une configuration
très spéciale qui s’appelle «attracteur».
L’ «attracteur» est une configuration; donc elle définit, dans un certain sens, une zone.
C’est une configuration qui décrit le comportement d’un système chaotique et, comme
nous le savons, un système chaotique n’est pas un système désordonné, mais un
système doté d’une complexité infinie.
relativement stable et prévisible. Sauf que cette prévisibilité globale est formée de
détails imprévisibles, parce qu’à l’intérieur d’un système chaotique sévit une extrême
sensibilité aux conditions initiales.
Même une moindre perturbation (le vol d’un moustique à Milan) peut provoquer, avec
les bonnes conditions, un bouleversement énorme (la destruction de la «Villa
Planchard» dessinée par Gio Ponti à Caracas).
Les «attracteur», à vrai dire, peuvent même changer leur forme globale si le système
est perturbé de manière drastique. De toute façon, à part ces métamorphoses radicales,
c’est avec chaque récursion que le système chaotique explore et trace une nouvelle
zone à l’intérieur de la région complexe, délimitée par son «attracteur». Le contour
même de l’«attracteur» est redessiné continuellement et s’enrichit de détails à mesure
que les récursions procèdent.
Chaque «attracteur» est tellement complexe qu’il contient en soi, à différentes échelles
(propriété de « l’invariabilité d'échelles»), aussi bien des zones de désordre pur, que
des zones d’ordre absolu et enfin d’autres de transition bidirectionnelle de l’une à
l’autre.
L’autre est le style de Gio Ponti. Lui aussi, dans son complexe, est immédiatement
reconnaissable. Même si nous n’avions jamais vu d’objet particulier de Gio Ponti,
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mais que nous connaissions quand même son oeuvre, nous réussirions sans grandes
difficultés à l’attribuer à ce dernier ou à son école.
Pourtant, aucune des oeuvres qui forment le style de Gio Ponti est prévisible avant son
apparition, ou «produisible» selon des règles.
Milan, 08/05/2009