Professional Documents
Culture Documents
« Tu es ce que tu manges. »
Brillat-Savarin
Le contexte historique
« I stand for the values of freedom [...] even if free-market
economics was not the most efficient system,
I’d still be in favor of it, because of the human values
it represents of choice, challenge and risk. »
Milton Friedman, auteur de Capitalism and Freedom
(University of Chicago Press, 1962)
b. Vulnérabilité enfantine
Mais la clef principale du succès de McDonald’s est sa façon de cibler les
enfants, à partir du sport et du cinéma. En 1996, McDonald’s et Walt
Disney Productions ont signé un accord pour dix ans, selon lequel
McDonald’s détient l’exclusivité des droits sur l’utilisation des films de Walt
Disney lors de ses promotions mondiales. Des critiques ont observé que
cet accord représente la plus grande alliance marketing jamais conclue. En
Ray Kroc n’était pas très porté sur l’école et n’avait eu aucun diplôme. Il
déclare dans son autobiographie que les jeunes seraient mieux au travail
qu’a l’école. « Il y a trop de bacheliers, et pas assez de bouchers. » Son
fameux slogan « KISS » est emprunté au Colonel Sanders, fondateur de la
chaîne de « fast food » Kentucky Fried Chicken. « KISS » est l’acronyme de
la formule « Keep It Simple, Stupid. » (Espèce d’idiot, ne complique pas les
choses !)16
Soixante-six pour cent des 1 500 000 salariés de McDonald’s ont
moins de 21 ans, et une bonne moitié de ces derniers ont moins de dix-huit
ans. La rotation annuelle du personnel est de trois à quatre fois plus élevée
avoisinant ses restaurants par les papiers sales et autres déchets ; (4) que,
en encourageant la consommation de bœuf, McDonald’s contribuait à la
croissance de l’industrie de la viande et, par conséquent, de façon
significative, à l’émission de gaz de méthane dans l’atmosphère.
Mais sur les points cruciaux soulevés par le tract, le Tribunal donna
satisfaction à Greenpeace. Le président Bell considéra comme justifiées les
accusations suivantes : (a) que l’alimentation de McDonald’s, en cas de
consommation régulière, présente des risques de cancer du sein et de
l’intestin ; (b) que l’entreprise exploite les enfants, en ciblant sur eux les
2 milliards de dollars annuels de son budget publicitaire, « pour les pousser
à faire pression sur leurs parents et à les harceler pour se faire amener au
McDonald’s » ; (c) que McDonald’s est « reconnu responsable de pratiques
cruelles dans l’élevage et l’abattage de certains des animaux utilisés pour
produire son approvisionnement » ; et (d) qu’il est suffisamment démontré
que McDonald’s est « fortement opposé à toute idée d’organisation
syndicale. »20
Dans son verdict final, le président Bell ramena de 120 000 livres
sterling à 60 000 l’estimation des dommages subis par McDonald’s. Les
accusés de Greenpeace, Helen Steel et David Morris, font actuellement
appel, ce qui va demander encore 2 ou 3 ans. Selon un article récent de
l’International Herald Tribune (1er avril 1999) la Cour d’Appel a encore
réduit l’estimation des dommages à 40 000 livres. Steel et Morris
maintiennent la procédure d’appel, en dépit des assurances données par
McDonald’s selon quoi l’entreprise renonçait au paiement de ces
dommages.
Ce procès a déclenché une avalanche d’informations sur de nombreux
sites Internet, en particulier <www.mcspotlight> et <www.mclibe>. Ainsi en
février 1997, 200 salariées sont tombées malades dans l’usine
vietnamienne McDonald-Disney, qui produit les jouets publicitaires pour les
« Happy Meals » de McDonald’s. Dans cette usine, plusieurs centaines de
femmes, âgées d’environ 17 ans, travaillent de 9 à 10 heures par jour,
7 jours par semaine, pour 6 cents de l’heure. Trois de ces femmes ont été
hospitalisées à la suite d’une intoxication chimique. Brad Ball, premier
vice-président de McDonald’s, déclara au même moment que les figurines
« Happy Meals » des « 101 Dalmatiens » avaient été le plus grand succès de
toute l’histoire de McDonald’s. « En nous embarquant dans notre nouvelle
alliance globale avec Disney », ajouta-t-il, « nous prévoyons de vivre
10 années inoubliables d’extraordinaires divertissements familiaux où les
consommateurs savoureront la magie de Disney chez McDonald’s
exclusivement. »21
Plus récemment, en France, McDonald’s est redevenu un lieu de
confrontation. Le 12 août 1999, à Millau, le chantier d’un nouveau
restaurant McDonald’s a été saccagé par 200 militants anti-McDonald’s à
l’initiative conjointe du Syndicat des producteurs de lait de brebis de
Notes
1. Texte d’une communication faite au Congrès de l’AFEA à l’Université de
Versailles-St. Quentin-en-Yvelines le 29 mai 1999.
2. Jack Greenberg, cité par Frédéric Béghin et Eric Wattez, « La machine
McDonald’s », dans Capital 96 (septembre 1999) : 52.
3. « First Quarter Stockholders’ Report, March 31, 1999 », <http://www.mcdo-
nalds.com./hatsnew/pressrelease/Press-Release04221999.html>. En 1998, le
chiffre d’affaires par zone géographique montrait que les États-Unis
représentent toujours la moitié des ventes, avec 18,1 milliards de dollars, suivis
par l’Europe (8,9 milliards), l’Asie-Pacifique (5,6 milliards), l’Amérique latine
(1,8 milliard), et « autres » (1,6 milliard). (Voir aussi Béghin et Wattez, op. cit.,
52).
4. John Vidal, McLible, Burger Culture on Trial (New York, 1997) 242-243.
5. John F. Love, McDonald’s, Behind the Arches (New York, 1995) 31.
6. Ibid. 10-16.
7. Love, op. cit. 15.
8. Paul Aries, Petit Manuel anti-McDo (Villeurbanne, 1999) 27.
9. Ray Kroc, Grinding it Out, The Making of McDonald’s (New York, 1987) 123.
10. Michael Quinlan, cité par Joel Kovel, « Bad News for Fast Food : What’s wrong
with McDonald’s ? », <http://www.McSpotlight.org/>.
11. Vidal, op. cit. 135.
12. Aries, op. cit. 19.
13. Love, op. cit. 308.
14. Ibid. 217-222.
15. Vidal, op. cit. 402.
16. Ibid. 25.
17. Ibid. 37.
18. Frédéric Béghin, « 1,5 million d’ “équipiers” dans les soutes », dans Capital 96
(septembre 1999) 68. (Selon Béghin, les équipiers en Scandinavie, en
Allemagne et en France sont représentés aujourd’hui, mais pas tous, et aux
États-Unis aucun.)
19. Kroc, op. cit. 210, et Vidal, op. cit. 220.
20. Voir Vidal, op. cit., chapitre 19, « Judgement Day ».
21. Koval, op. cit.
22. Pierre-Emmanuel Parais, « Un McDonald’s en miettes au royaume du
Roquefort », dans Midi Libre (13 août 1999) : 23.
23. Voir Douglas Dowd, Against The Conventional Wisdom, A Primer for Current
Economic Controversies and Proposals (Boulder, CO, 1998) chapitre 1, « Myths
and Realities of the Free Market ».
24. Une croissance de presque 1 000 restaurants par an, en 1996 et 1997, a
provoqué une révolte parmi les franchisés, qui voyaient leurs profits baisser.
Cette révolte a eu raison du PDG Mike Quinlan, remplacé début 1998 par Jack
Greenberg. Mais en 1999, sous la direction du nouveau président de
McDonald’s, l’entreprise envisage de « continuer à ouvrir 4 ou 5 McDonald’s par
jour dans le monde. » (Voir Béghin et Wattez, op. cit. 52.)
25. Richard Barnet & John Cavanagh, Global Dreams, Imperial Corporations and
the New World Order (New York, 1995) 15 & 429. En décembre 1983, Ray
Kroc était classé dans le journal Esquire, à côté de Martin Luther King, Abraham
Maslow, et Reinhold Neibuhr, parmi les cinquante individus qui, au vingtième
siècle, ont le plus contribué à l’« American way of life ». (Kroc, op. cit. 208.)
Bibliographie
Livres
Ariès, Paul. Petit Manuel Anti-McDo. Villeurbanne : Édition Golias, 1999.
Barnette, Richard. Global Dreams, Imperial Corporations and the New
World Order. New York : Touchstone Press, 1994.
Brillat-Savarin, Anthelme. Physiologie du goût, avec une Lecture de Roland
Barth, Paris : Hermann, éditeurs des sciences et des arts, 1995.
Dowd, Douglas. Against The Conventional Wisdom, A Primer for Current
Economic Controversies and Proposals, Boulder, CO, 1998.
Frab, Peter & George Armelagos. Anthropologie des Coutumes Ali-
mentaires. Traduit de l’Américain par William Desmond, Paris :
Éditions Denoël, 1980.
Kroc, Ray. Grinding it Out, The Making of McDonald’s. Chicago : St. Mary’s
Press, 1977.
Love, John F. McDonald’s, Behind the Arches. New York : Bantam Books,
1995.
Mishel, Lawrence, et al. The State of Working America, 1998-99. Itheca :
Cornell University Press, 1999.
More, Stephen & Dean Stansel. Ending Corporate Welfare as We Know It.
Washington, D.C. : The Cato Institute, 1995.
Pendergrast, Mark. For God, Country and Coca-Cola, the unauthorized
history of the great American soft drink and the company that makes
it. New York : Collier Books, 1993.
Vidal, John. McLibel, burger culture on trial. New York : The New Press,
1997.
Zepezauer, Mark & Arthur Naiman. Take the Rich Off Welfare. Tucson, AZ :
Odonian Press, 1996.
Articles
Belot, Laure & Françoise Bostnavaron. « La France, nouvelle terre de
bataille des géants de la pizza », Le Monde (14-15 février 1999) : 6.
Cauhape, Véronique. « Les traditions de la table résistent au fast-food », Le
Monde (19 février 1999) : 25.
Chomsky, Noam. « Democracy’s Slow Death, » In These Times (28 no-
vembre 1994) : 25-26.
Desmonts, William. « Le système McDo », dans Alternatives Économiques
151 (septembre 1997) : 54-56.
Kennedy, Robert F. Jr. « Earth Day and Pig Farms : Factory Food for
Thought », International Herald Tribune (20 avril 1999) : 7.
Kovel, Joel. « Bad News for Fast Food : What’s Wrong with McDonald’s ? »,
sur le site <http://www.mclibel.org>.
Parais, Pierre-Emmanuel. « Un McDonald’s en miettes au royaume du
Roquefort », Midi Libre (13 août 1999) : 23.
« Résistance à la MacDomination », sur le site <http://www.mcspotlight.org>.